
Des maisons européennes dans les quartiers ?
– 10 janvier 2025 –
Des constats et une absence de l’Europe dans les quartiers populaires
Du point de vue des fonctions traditionnellement attribuées à la citoyenneté moderne (identification affective, intégration sociale, participation politique), celle-ci semble en effet bien limitée en général et encore plus dans les quartiers et banlieues : Les droits sont modestes par rapport à ceux qui caractérisent les citoyennetés nationales et qui, surtout, ne s’exercent qu’au-delà des frontières nationales ; on constate l’absence d’adossement à des symboles ou à un grand récit ; une dimension identitaire presque nulle ;
Les problématiques dans les quartiers n’ont pas changé avec l’Europe, les problèmes socio-économiques se sont accentués, les quartiers populaires font face à l’arrivée de nouvelles populations et à l’intensité de la crise économique, accentuant les phénomènes d’exclusions, en particulier celle des jeunes. Le repli communautaire s’est aussi accentué. Les différents “modèles” d’intégration/communautaires en France et en Europe ont montré leurs limites.
La démocratisation de la culture est un échec patent, alors que celle-ci est un élément fondamental d’émancipation individuelle ; Lorsque l’on voit les résultats des enquêtes menées sur les pratiques culturelles des populations : l’accès à la culture reste l’apanage d’une population privilégiée.
La mobilité des jeunes et des adultes en Europe reste très limitée, initiatives éparses de quelques établissements scolaires et associations…, cette dimension est rarement prise en compte dans les projets qui s’exercent dans les quartiers et territoires.
Alors-même que l’ouverture culturelle et la mobilité restent des enjeux majeurs pour les quartiers populaires, comme la reconnaissance du potentiel, de la créativité des habitants, de la valorisation de la diversité culturelle et de l’interculturalité. Les projets d’action culturelle favorisent pourtant le développement d’un sentiment d’appartenance à un territoire, un pays, un continent, peuvent créer de nouvelles dynamiques individuelles et collectives, en élargissant le champ des possibles en France et en Europe. Dans les pays anglo-saxons, ce sont les “community arts” qui les développent.
Le développement des échanges entre acteurs culturels, sociaux, politiques, chercheurs, au niveau européen, permettrait de valoriser toutes ces pratiques, de les mettre en perspective et de les faire évoluer vers de nouvelles démarches. La mise en réseau des acteurs pourrait de même favoriser la création d’échanges d’habitants, et différentes formes de dialogue interculturel.
La citoyenneté Européenne reste un objet à construire
Il manque encore un véritable espace public de médiation, qui permettrait de faire correspondre le lieu de la décision collective et celui de l’action publique. Tel est sans doute le « nouveau » rôle collectif que pourraient se donner les associations en Europe…
L’Union Européenne devrait être attentive à développer une stratégie, ainsi que des dispositifs visibles dans ces quartiers, pour « investir dans la jeunesse et la mobiliser », de mettre en place plus de moyens dans les politiques de jeunesse qui affectent leur vie quotidienne et améliorent leur bien-être » et de « promouvoir le potentiel des jeunes Européens pour le renouvellement de la société et ainsi contribuer aux valeurs et objectifs de l’Europe »
- Le 1er défi d’ampleur pour associer à l’Europe ces territoire relégués, est de promouvoir la construction d’un espace Européen de l’éducation, en permettant aux habitants, professionnels et aux cadres de croiser leurs regards, leurs projets et leurs expertises.
- L’autre défi est de permettre, que l’histoire, la culture et les valeurs communes soit une réalité, qu’il faudrait rendre plus accessible à la conscience collective, pour pallier la consistance juridique peu perceptible de la citoyenneté européenne. Le droit ne peut à lui seul rapprocher l’Europe des Européens, d’autant plus que le fonctionnement de l’UE est encore peu intelligible. Et à trop mettre en avant les apports économiques de l’Union, les promoteurs de celle-ci rendent la citoyenneté européenne et sa substance démocratique encore moins perceptibles.
La citoyenneté européenne n’est pas tant un statut donné d’en haut, qu’un objet à construire par en bas ; et là réside sans doute une vraie responsabilité collective pour les associations et les acteurs dans ces territoires.
L’enjeu pour les associations et intervenants divers dans ces quartiers et territoires est :
- De promouvoir une mobilité européenne et internationale à travers différents types de projets : (job, emploi, stage, volontariat, bénévolat…) particulièrement auprès des jeunes de 18 à 30 ans et des publics qui en sont éloignés,
- De promouvoir des campagnes d’information, de sensibilisation et/ou de promotion des dispositifs de mobilité européens et internationaux,
- D’accompagner les publics dans le cadre de projets de mobilité internationale, de pérenniser cet engagement citoyen, et d’assurer le suivi de ces projets dans la durée,
- La mise en place de formations auprès de différents publics (préparation au départ, interculturalité, coopération Européenne…),
- D’organiser des événements artistiques et culturels croisés (expositions, musique…)
Sagiterre œuvre dans ces quartiers et territoires, depuis plusieurs années dans le cadre de ses missions d’ingénierie sociale et culturelle, de la formation professionnelle, à promouvoir la dimension Européenne et à l’intégrer dans une démarche de développement pérenne.
C.Boughattas